Je suis sans doute très naïf.
Je crois fermement au pouvoir transformateur de la poésie. Oui, elle peut changer le monde. Oui, sa force, son évocation de la Beauté et de la Paix peuvent changer les choses. Il suffit parfois d'écouter un témoin ou l'autre : quelqu'un, quelqu'une qui a lu un de vos poèmes et s'est dit "Bon sang, comme c'est beau! Il faut le relire, ça me chatouille le ventre, ça me rappelle un moment dans ma vie, mon enfance, je ne sais quoi, et je me sens mieux, je me sens bien, ce poème a fait bouger une fourmi au fond de mes entrailles!" et déjà cette fourmi a changé le monde.
Mais si elle se limite à se voir imprimée dans des livres, que ces livres ont des tirages ridiculement bas et que personne ne les lit, la Poésie n'y arrivera jamais. Attention : je ne suis pas CONTRE les livres, j'en ai fait éditer déjà 20 et j'aime ça. Mais ils ne me suffisent pas.
Prenons l'exemple par l'autre bout : si un.e quidam.e cherche de la poésie, il.elle doit d'abord entrer dans une librairie. Bravo, beaucoup de gens le font. Mais ce sont des convaincus. Croyez-moi, une large partie de la population n'ose pas entrer. Cela élimine déjà une partie du monde que je rêve de transformer. Ensuite, il s'agit de trouver le rayon poésie. Bien sûr, les libraires font ce qu'ils peuvent et quelques uns d'entre eux ont de très bons rayons poésie. Mais cela se réduit souvent tout de même à une valise ouverte, quelques cahiers, une petite étagère qui a le mérite d'exister, mais qui reste modeste. Troisième étape : ouvrir un livre. On lit les couvertures de Victor Hugo, Verlaine, Eluard, Prévert (tiens, que des mecs?),... et on ouvre au jugé de nos souvenirs d'école. Mais qui va ouvrir un Mélanie Leblanc? Un Pierre Soletti? Un.e inconnu.e d'aujourd'hui qui fait des merveilles à découvrir? OK, disons qu'il y en a un.e, après ces trois étapes à passer qui ouvre un poète d'aujourd'hui. Il.elle ouvre le livre. Lit une page. 4 secondes. Le referme. "Mmoui, pas mal, très beau, même!" 4 secondes de vie pour ce poème rare qui a demandé des nuits d'insomnie à l'auteur.e
Comment pouvez-vous imaginer que la poésie transforme le monde en tenant 4 secondes entre les mains d'un.e convaincu.e au fond d'une librairie? Rien, rien, rien. Elle n'a aucune chance d'y arriver. "Oui mais si le livre gagne un prix, ce sera lu par beaucoup plus de monde!" Euh... nous passons de 100 à 300 lecteur trices... sur les 65 millions d'habitants de ce pays!
Je suis fier et convaincu que d'écrire sur les murs, coller des stickers, afficher en sauvage, dire, sussurer ou crier des poèmes dans la rue sont des actions directes pour arriver à ce que la conscience du monde grandisse. A ce que le monde aille mieux. A ce qu'un passant, une passante se dise "Ma journée a été touchée par la beauté de quelques mots", Bref, à ce que le monde soit transformé. Oui, c'est un travail de fourmi qui traverse le désert et déplace trois grains de sable. Mais c'est un pas vers la paix et contre cet écroulement qui nous menace de tout son poids. Voilà.
En attendant que l'on se rencontre, voici le lien d'une soirée Cocxys à Paris où j'ai dit quelques textes :








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