mercredi 5 juin 2024

POEMA en Lorraine, suite




"J'irai, ailes ouvertes et poings serrés"

Ce lundi 3 juin, à Eulmont, nous allons poétiser la voie verte. Le macadam devient écritoire, les tables de pique-nique deviennent ardoises, le tunnel devient galerie d'exposition et les saules, cimaises. Il y a de mes phrases, bien entendu, mais aussi les travaux des ateliers donnés dans la région depuis trois mois. De quoi surprendre les cyclistes qui s'arrêtent, étonnés.






- Et pour toi, Mohamed, c'est quoi, la poésie?
- C'est l'enfance, tout ça, à l'école, on en apprenait. C'était la vraie vie, là. 
La poésie, c'est la vraie vie, oui, maintenant, à notre âge, 
avec le métier, tout ça, on l'a quittée, la vraie vie.
- Ah bon?
- Ben oui, faut bien payer son loyer.
- T'aurais pu y rester. Devenir poète.
- C'est pas un métier, ça. Moi, je suis ouvrier municipal. 
Ben oui, faut bien payer son loyer, 
c'est ce que je dis.







Ils sont cinq. Cinq hommes larges et forts, tous en "réinsertion professionnelle" invités pendant leur formation Com-com à assister à mon atelier poésie. Mohamed, le plus grand, regrette de ne plus être dans la Vraie Vie. Jean-Marie, lui, me dit que la poésie, c'est par exemple : "La vie est une tartine de merde que l'on mord chaque matin." Didier, le plus âgé, a perdu la moitié de ses dents. Mais il dessine renard et belette en souriant. Marcelino cherche ses mots et Pascal finit son sandwiche de midi. Alexandra, la seule femme, écrit un poème : 
"La vie SERA le passé, la Mort, c'est le futur et l'Amour, c'est le présent." 
Et cinq hommes autour de la table rient de se découvrir poètes. 
Avant de tenter la linogravure, Jean-Marie emporte les résultats de nos cadavres exquis 
"-Ca, je vais le refaire avec mes amis, vous pouvez être sûrs!"
Jolie victoire.





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